1re période : 1993-1995
Alors que la Ville de Montréal implante dans quelques quartiers, dont Hochelga-Maisonneuve, le programme Vivre Montréal en santé, vingt-deux groupes du quartier s'entendent, le 24 mars 1993, sur la nécessité de développer une concertation intersectorielle. La Table sur le développement local Hochelaga-Maisonneuve mène alors une réflexion afin de doter le quartier d'une vision du développement local. Elle présente un mémoire lors des audiences publiques de la Ville de Montréal dont l’énoncé d'orientation est intitulé Le développement communautaire au cœur du développement social de Montréal. Le mémoire affirme que «la concertation suppose évidemment une adhésion entièrement libre, qu'elle n'est assujettie à aucune condition qui ait été acceptée par l'ensemble des partenaires et encore moins à aucune pression».
Lors de son incorporation, en novembre 1995, sous le nom du Conseil pour le développement local et communautaire d'Hochelaga-Maisonneuve (CDLCHM) la concertation regroupe essentiellement des organismes communautaires du quartier. Sans exclure structurellement les autres partenaires, les stratégies de concertation s'adressent alors plus spécifiquement aux organismes communautaires. Cette vision s'articule autour des concepts d'éducation populaire, de défense des droits des personnes à faible revenu, du renforcement des organismes communautaires, de la lutte contre la pauvreté par l'employabilité et du développement économique communautaire. Jusqu'à la fin des années 1990, la précarité financière pousse plusieurs organismes locaux à faire du développement communautaire un enjeu majeur. Pas de développement social local sans développement communautaire.
2e période : 1995-2008
De 1995 à 2005, les nombreux enjeux économiques et sociaux qu'affronte le quartier poussent aussi les organismes à se déployer dans d'autres secteurs d'intervention où apparaissent de nombreux besoins. Rassemblés au sein de Concertations sectorielles ou de Comités du CDLCHM, les organismes et institutions mettent en œuvre diverses actions et interventions dans plusieurs champs du développement social local dont : la sécurité alimentaire, l'aménagement, le logement social, la toxicomanie, la santé mentale, l'éducation, le sport-loisir,... Ces Concertations et Comités mobilisent l'ensemble des partenaires en plusieurs lieux et sont source d'innovation importante en matière d'intervention.
Dans la foulée de l'organisation des Forums de développement social financés par la Direction de la Santé Publique de Montréal, le CDLCHM organise en novembre 1997 son 1er Forum local de développement social. En plus de définir des priorités d'action, le Forum est l'occasion de discuter de la vision du développement local telle que mise en pratique par le CDLCHM. Le document « Vers une vision du développement local » est adopté en décembre 1997. Cette approche comprend alors les défis suivants :
- le développement économique communautaire ;
- la lutte contre l'exclusion et la défense des droits sociaux ;
- l'amélioration du cadre de vie (cadre bâti, desserte commerciale, espaces publics, etc.) ;
- la prise en charge de la santé physique et mentale ;
- le regroupement des forces vives dans tous les domaines sociaux et culturels.
En septembre et décembre 2000, le CDLCHM organise deux journées de réflexions intitulées «Rencontres du mouvement communautaire». Lors de ce 2e Forum les participant.e.s ont soulevé que la collaboration récurrente et régulière entre les groupes du quartier est difficile. Les alliances stratégiques des intervenant.e.s d’un même secteur d’affinité ne semblent pas plus faciles que les alliances entre les deux grands secteurs que nous avions divisé schématiquement entre les groupes de type «sociosanitaire» et les groupes de type «socioéconomique». Les groupes «sociosanitaires» offrent une aide directe à la population (dépannage et soutien) et des activités d'intégration sociale (entraide, éducation populaire) aux personnes exclues et en difficultés. Les groupes «socioéconomiques» favorisent l'insertion des personnes par une activité économique (employabilité, emploi et entrepreneuriat).
Il y a près d’une dizaine de Tables de concertation dans le quartier. Cependant, elles ont très peu de liens entre elles. À la longue, ce foisonnement suscite divers problèmes : éparpillement, perte d'énergie, circulation déficiente de l'information, concurrence, duplication. Des clivages naissent entre les groupes sur le plan du financement, du type d'intervention, des priorités d'action. Ceci fragilise les stratégies mises en place par les Concertations tant sectorielles que multisectorielles ce qui rend plus difficile l'atteinte d'une certaine cohésion dans l'action.
3e période : 2008-2010
En mai 2008, une démarche conduisant vers le Forum de développement social local 2010 est initiée. La préparation de cette démarche est l'occasion de faire un retour sur les deux périodes où a été développée la vision de développement social local. Après plus de deux décennies d'action en développement social local des constats émergent : consolidation d'une partie du mouvement communautaire, maturité plus grande des intervenant.e.s à travailler intersectoriellement, prise de conscience des limites de l'intervention sectorielle.
La démarche s'est déroulée sur deux ans. Elle s'articule selon deux principes : recentrement de la vision et des interventions selon cinq chantiers thématiques ou secteurs d'intervention et définition des priorités d'actions suscitant la concertation intersectorielle et multiréseau. Cinq chantiers thématiques et trois rencontres de Forum ont permis à tous.tes les intervenant.e.s de s'approprier la vision découlant de ces deux principes et d'en préciser le contenu.
Dès l'amorce, en 2008, du Forum de développement social local, la nécessité de revoir les mécanismes de concertation et pratiques citoyennes s'est posée. Ainsi, le 13 mai 2010, lors d'un exercice de priorisation, le Forum a entériné cette nécessité en adoptant ses trois priorités d'actions concertées :
- Restructurer la concertation intersectorielle et multiréseau ;
- Revitaliser le sud-ouest du quartier ;
- Stimuler la citoyenneté collective.
Période de prolongation 2010-2014
L'année 2011 constituait un défi collectif de mobilisation de la communauté, afin que les priorités d'actions concertées issues du Forum puissent se concrétiser.
Suite au Forum, nous avons modifié certains buts pour lesquels la corporation a été constituée et apporté des modifications au règlement général. Nos buts sont davantage en lien avec l'actualisation de la mission, soit de chercher la participation des divers acteurs de la communauté dans une démarche collective et la mise au point d’actions concertées en développement social local entre les partenaires. Les trois principaux buts de la corporation sont :
- Favoriser la concertation et la mobilisation des acteurs sociaux du territoire afin de lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale ;
- Susciter ou mener des actions communes visant le mieux-être de la population du territoire et la participation des citoyennes et citoyens à la vie démocratique ;
- Développer un meilleur partenariat entre les organismes communautaires afin d'améliorer l'accessibilité aux services communautaires et institutionnels.
Nous avons également précisé les valeurs, les défis, le membership, la structure de la corporation et modifié les objets de la charte. Ainsi, le 24 novembre 2011, le CDLCHM amorçait une nouvelle étape de son histoire. Lors de l'assemblée générale spéciale les membres des concertations sectorielles, les citoyen.e.s et groupes qui avaient signifié leur intérêt à devenir membre de la corporation le sont devenus officiellement.
D'une instance de concertation mettant en lien dans son processus décisionnel, presque essentiellement de groupes communautaires, le CDLCHM a accru l'éventail de son membership et diversifié considérablement la répartition du pouvoir dans son processus décisionnel. Le mouvement communautaire accepte désormais que les autres acteurs sociaux de la communauté puissent intervenir formellement dans toutes les étapes décisionnelles. Rappelons que ces acteurs pouvaient s'exprimer librement et influencer la concertation dans le cadre de Comités, d'activités citoyennes ou en s'engageant dans des groupes dont la mission est d'offrir des services à la population. D'un statut d'influence, ces acteurs deviennent des acteurs de plein droit.
Dernières étapes de ce processus, le nouveau règlement général était adopté le 13 juin 2012, le 18 juin de l'année suivante, à la suite d’un concours auprès des membres, nous avons adopté le nouveau nom de la corporation soit La Table de quartier Hochelaga-Maisonneuve et le 6 octobre les six Comités de concertation.